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chambre d’huile


11 mars – 03 septembre 2017
Commissariat : Delphine Masson

 

À l’occasion de l’ouverture du CCC OD, Per Barclay réalise dans la nef du centre d’art l’une de ses plus grandes « Chambres d’huile » jamais présentées dans un contexte d’exposition.

Il est extrêmement rare de faire l’expérience de ce type d’installation emblématique dans l’œuvre de l’artiste norvégien, puisque les « Chambres d’huile » n’ont pas nécessairement vocation à être exposées. Elles sont en effet le plus souvent conçues comme des dispositifs de prise de vue uniquement destinés à créer des images photographiques.

 

La longue collaboration entre Per Barclay et le CCC OD depuis 2001 a permis d’expérimenter ce dispositif en tant qu’installation in situ à plusieurs reprises, amenant l’artiste à le concevoir peu à peu comme une œuvre autonome, indépendante de sa destination photographique. Une œuvre à part entière qui s’épanouit à grande échelle dans le volume monumental de la nef.

La « Chambre d’huile » transforme le réel et révèle le lieu sous un nouveau jour en le magnifiant. Elle fait apparaître des détails auxquels le regard seul n’a pas accès. Pour cette exposition inaugurale, l’installation de Per Barclay permet ainsi à l’architecture monumentale de la nef de se dévoiler pour la première fois avec une intensité amplifiée. L’installation exacerbe en effet deux caractéristiques essentielles de ce grand espace du CCC OD : sa hauteur exceptionnelle de 11 mètres ainsi que la transparence de ses quatre grandes baies vitrées ouvertes sur la ville.

 

L’intervention de Per Barclay est très paradoxale, tant l’intervention au sol semble au premier abord ne pas tirer parti du volume impressionnant de l’espace pour faire au contraire le choix du vide. Pourtant, ce volume resurgit dans toute sa dimension dès que l’on s’approche du reflet, qui ouvre un gouffre d’autant plus vertigineux que la hauteur sous plafond de la nef est particulièrement élevée.

La « Chambre d’huile » du CCC OD donnera lieu à une œuvre photographique se rattachant à la part la plus connue de ce travail. Mais c’est ici l’expérience rare de l’installation in situ qui est en jeu, marquée tout d’abord par la présence physique de l’huile noire, cette matière liquide et visqueuse qui évoque de sombres eaux dormantes, tel un Styx aux profondeurs étranges et insondables.

Se trouver face à une « Chambre d’huile », c’est ainsi faire coexister en un même lieu la réalité et son image. Malgré la démarcation nette séparant les deux, le trouble demeure, la perception oscille en permanence. Difficile également de déterminer la véritable nature de ce qui est pourtant sous nos yeux : liquide ou solide, surface plane ou abîme insondable…

 

L’installation de Per Barclay dans la nef interroge plus que jamais ces ambiguïtés qui agissent sur la perception. Elle joue également tout particulièrement du statut hybride de ces installations partagées entre l’image et la sculpture, en appartenant à ces deux champs à la fois. Adossée à l’architecture sur deux de ses côtés, elle se confond presque avec elle pour produire l’illusion d’une image pure dénuée de toute matérialité. Mais elle est aussi, sur ses deux autres côté une sculpture, un objet physique découpant l’espace. Dans cette partie saillante, le seuil est très légèrement surélevé, juste assez pour créer un effet de décrochement qui désigne le bassin comme un relief alors même qu’il s’ouvre sur le vide.

 

[Extrait du dossier de presse de l’inauguration du CCC OD – 2017]